Les lendemains d’élections, il y a les coups d’éclats médiatiques et autres interventions théâtrale. Il y a aussi les autosatisfecit de ceux qui n’ont que leur intérêt personnel comme ligne d’horizon. Il y a aussi ceux qui refont le match après le match. Et enfin, il y a les adeptes de la méthode Coué.

Mais surtout, il y a les chiffres et notre système électoral qui donne le nombre de sièges à l’Assemblée Nationale. Le réel imposé par la démocratie en quelque sorte.

Déjà , les chiffres des seconds tours des législatives de 2017 et 2022.

Et les chiffres entre présidentielles et législatives 2022 :

En réalité, le mouvement présidentiel recule peu par rapport au second tour de 2017 mais enregistre une importante démobilisation de ses électeurs au premier tour en 2022, ce qui l’a empêché d’avoir beaucoup de candidats présents pour le second tour et de créer une dynamique de premier tour. Les 2 points perdus entre 2017 et 2022 lui coûte cher (environ 105 sièges). Le parti de la Majorité Présidentiel aura perdu 57 duels contre la Nupes, 52 contre le RN et 7 contre la droite.

L’effondrement des LR sert et amplifie la percée du FN. Le même phénomène de transfert des voix entre Valérie Pécresse et Marine Le Pen lors de la présidentielle a été observé lors de ces élections. La droite passe de 130 à 64 sièges, elle sauve les meubles.

Le RN est le grand gagnant. Il fait une entrée fracassante au Parlement avec 90 députés soit 11 fois plus qu’en 2017 en ayant seulement doublé son % de voix. La grande gagnante est l’extrême droite populiste, d’ailleurs bien silencieuse lors de ces élections. Suite logique de la dynamique des présidentielles et de l’érosion progressive du Front républicain.

D’ailleurs en parlant du Front républicain les sondages sont éloquents. Dans le cas d’un duel RN / Nupes, les électeurs Ensemble se répartissent comme suit : 48% d’abstention / 34% pour Nupes et 18% pour le RN. Dans le cas d’un duel Ensemble – RN, les électeurs Nupes se répartissent comme suit : 45% abstention / 31% ensemble / 24% RN.

Contrairement à la fake news propagée par Jean Luc Mélenchon, non les électeurs ensemble n’ont pas voté massivement pour le RN. Bon ceci dit, vu les sondages, concernant le Front républicains entre électeurs ensemble et Nupes c’est « 1 partout et balle au centre ».

Ceci dit vu les 5 ans passés qui ont vu RN et Insoumis taper sur Macron, je comprends qu’un électeur Ensemble puisse s’abstenir. Je me serais moi même abstenu dans le cas où le Nupes aurait été LFI et aurait examiné au cas par cas dans le cas où le candidat Nupes aurait été PS ou Vert. Si le candidat Nupes avait PCF j’aurais sans doute voter pour lui. bon mais en même temps mon avis ne compte pas et à Montreuil je n’ai pas eu le choix vu que le député sortant a été élu directement au premier tour (on ne fait jamais les choses à moitié à Montreuil).

Sur 116 députés sortant de la majorité présidentielle, le RN en a battu plus de 50. La banalisation du RN et sa capacité à capter les colères (notamment celle de la France périphérique), la sur-médiatisation de certains sujets qui préoccupent les français (la sécurité notamment) mais aussi les attitudes antirépublicaines de certains nupésiens (et bien d’autres cause sans aucun doute) auront alimenté le RN qui n’a désormais plus de plafond verre et n’a plus qu’à retirer les marrons du feu. La marche à pas feutrés vers 2027 avance à grand pas et sera sans nulle doute aidée par une implantation désormais territoriale du RN.

La Nupes sauve les meubles (et surtout ceux de la France insoumise). Le bidule Merluchonesque permet une progression considérable pour la gauche par rapport à la désunion de 2017, à condition de ne pas oublier qu’il n’y a aucun progrès par rapport à la présidentielle, ni par rapport au 1er tour des législatives (seulement + 700 000 voix) et que ça reste un étiage historiquement bas. Rappelons qu’en 2012, le (PS + FDG+Ecolos)  avait fait 24% des inscrits. Mélenchon ne sera pas premier Ministre (qui l’eut crut ?). Mais sa stratégie aura tout de même réussi à éviter la dispersion des voix au premier tour, à consolider un socle à gauche (celui d’une gauche toujours plus radicale) et surtout à assoir son hégémonie sur ses petits camarades avec 55 députés de plus. Même si ce n’est pas ma tasse de thé, je dois reconnaître le talent du stratège.

Enfin, dernier grand gagnant de cet élection : l’abstention. 53,77% des inscrits au second tour et 52,49% au premier.

Reflet de l’hyperprésidentialisation de la Vème république que le quinquennat aura accéléré, sentiment du vote inutile pour les plus défavorisés, stratégies d’alliance sans fondements programmatiques, hypermédiatisation des élections dignes des plus grands « shows à l’américaine » etc ? Sans doute tout cela et d’autres causes encore, la cause n’étant pas mono-factorielle.

Les élections présidentielles de 2022 ont confirmé une tripolarisation de la vie politique en France amorcée depuis l’élection de 2017 : l’extrême droite populiste, une gauche radicale non moins populiste et un pôle centriste.

Les digues se sont affaissées en 2017 suite à l’affaissement des deux partis historiques de gouvernement (PS et LR). Une inquiétude quand même à mon avis : les deux pôles extrêmes peuvent chacun récupérer des voix chez l’autre du fait de la porosité d’une partie de leur électorat et de leur ligne stratégique consistant à capter la colère.

Soit dit en passant, ceux qui accusent Emmanuel Macron d’être la cause de la montée du RN feraient bien de réviser leur histoire avant de sortir pareil argument. Ils oublient un peu rapidement l’affaire des costumes de Fillion ainsi que les frondeurs du PS qui ont saboté la fin du quinquennat Hollande et mité le PS en interne. Et ils oublient aussi que le RN a pris +8 points entre 2012 et 2017 alors qu’entre 2017 et 2022 il n’ a pris que +4 points. Maigre consolation me direz vous.

D’ailleurs, à n’en pas douter, l’enjeu pour Marine Le Pen, profitant des 90 députés, sera de s’installer comme la première opposante à Emmanuel Macron en tentant de supplanter Jean Luc Mélenchon dans ce rôle.

Cette tripolarisation se traduit aussi géographiquement. Il y a aussi la France l’Ouest et celle de l’Est. Il y a la France des centres urbains et la France périphérique. A l’échelle plus micro, en région parisienne le même phénomène est aussi observé. On vote majoritairement selon sa situation sociale. En d’autre terme le vote est sociologique. C’est plus que jamais vrai.

Je constate quand même que, sans que le nombre de sièges soient exactement proportionnel au poids de chacun des pôles, cette nouvelle Assemblée représente l’expression du suffrage tel qu’il est ressorti à l’issue de la présidentielle de 2022

Ce n’est pas un jugement de valeur, c’est un constat. Est-ce un bien, est ce un mal ? L’avenir le dira. En tout état de cause ce sont les électeurs qui l’ont choisi. Il convient donc d’être en capacité de faire ce constat, de respecter ce choix et d’en tirer les conclusions nécessaires.

Attention, même si je porte ce constat cela ne m’empêche pas en tant que militant d’être déçu des résultats et de la perte des 3 députés de Seine Saint Denis. Déçu parce que je suis convaincu que des réformes sont à mener et que vue la situation à l’Assemblée cela risque d’être plus compliqué que prévu. Et déçu parce que les 3 députés Ensemble ! de Seine Saint Denis ont fait du bon travail sur des sujets aussi essentiels que l’éducation ou le numérique entre autre.

En somme, les français ont remis « l’église au centre du village » et ont envoyé un message clair : ils veulent être représentés dans leur diversité. Pour cela certains sont prêts à voter pour les populistes. C’est un fait, ils ont tord, mais c’est un autre débat.

Une fois ce constat établi et dépassé, quoi faire ? Et bien je n’en sais rien et j’avoue que bon nombre de commentateurs, experts et autres « Yaka fokon » me pompent sérieusement l’air. Les français ont élus démocratiquement (oui oui) un Président de la République, laissons le agir en responsabilité.

Gageons néanmoins que dans cette situation inédite, la démocratie ainsi que l’intérêt général des français seront gagnants. Personnellement, j’en doute à la vue des deux forces d’opposition qui composent l’Assemblée (LFI et le RN).

Mais j’espère avoir tord. Ceci dit, à l’heure où j’écris ces quelques lignes, j’apprend que LFI veut déposer une motion de censure pour rejeter le gouvernement. Décision complètement inutile en passant puisque pour qu’une motion obtienne la majorité il faut 289 voix or, même en additionnant les sièges Nupes et RN, le total ne frôle que 220 voix (j’ai compté le PS mais j’espère qu’il ne soutiendra pas cette motion imbécile, contre productive et inutile). Tout conflictualiser n’est pas à l’honneur de la FI. Ceci dit, les plus grands démocrates ne sont pas toujours là où on les attend surtout lorsqu’ils sont insoumis.

En tout état de cause, continuons à être convaincus que la politique peut changer les choses mais tout en ayant en tête que la démocratie c’est aussi et avant tout le pluralisme même si ce dernier n’est pas très appétissant lorsqu’on regarde la composition de la nouvelle Assemblée Nationale.

Espérons que certains apprendront la culture du compromis et sortiront des positions d’opposants dogmatiques tandis que d’autres cultiveront le respect et la considération pour la diversité des partenaires.

Avec un gros effort et de la bonne volonté on peut y arriver. Enfin, je l’espère …. car la démocratie nous oblige à écouter parler les urnes.

« L’adhésion populaire est essentielle. Avec l’adhésion populaire, rien ne peut échouer ; sans elle, rien ne peut réussir » Abraham Lincoln