Le 24 avril au soir, le 11ème président de la République française sera élu. Avant le deuxième tour, il y a le premier tour, dimanche prochain. Mon choix de voter pour Emmanuel Macron n’est inconnu pour personne. C’est un choix assumé à la vue du bilan, mais c’est aussi et surtout un choix de société.

Depuis plusieurs décennies maintenant un phénomène de dislocation du référentiel commun autours duquel s’organisait la société française à émergé progressivement. La société française s’est progressivement non pas délitée, mais fragmentée d’un point de vue social et culturel. Il suffit de lire l’excellente analyse de Jérôme Fourquet dans « L’Archipel Français » pour constater et prendre conscience de ce phénomène amorcé dés la fin des 30 glorieuses. La France du granit d’un côté et la France du calcaire de l’autre c’est fini.

La récente crise des Gilets Jaunes (soyons précis : les français et françaises pacifistes des premières manifestations autours des ronds points de communes de Province) est un exemple qui démontre le clivage entre cette France reléguée et celle des Métropoles. Les élections municipales de 2020 avec l’arrivée aux responsabilités dans les Métropoles – où le niveau de vie est plus aisé qu’ailleurs en France – de nombreux candidats du parti écologiste en sont aussi un exemple. Plus que jamais il y a la France des territoires périphériques qui finit difficilement les fins de mois et la France mondialisée des Métropoles où vivent les ménages les plus aisés.

C’est dans ces interstices que le Front National a puisé son électorat, dans cette France souvent post industrielle, marquée par le chômage et les inégalités territoriales. Ce phénomène n’est pas récent. C’est le 11 septembre 1983 à Dreux en Eure et Loire que pour la première fois et contre toute attente qu’un parti jusque là relativement groupusculaire, le FN, rentre à la Mairie. Et ce n’est pas dans n’importe quel territoire. Dreux est alors la 9ème ville la plus pauvre de France et un bassin industriel important en déclin. Désindustrialisation, chômage, immigration, le terreau était alors favorable pour le front national. Le mot d’ordre de Stirbois sera alors « la montée de l’insécurité et du chômage est liée à la progression constante du nombre d’immigrés à Dreux.. », amalgame complètement irrationnel et sans fondement entre immigration et insécurité.

Les années passent, la mondialisation fait son œuvre et parrallèlement, la gauche française choisit progressivement comme stratégie d’abandonner les classes populaires (aujourd’hui 43% des ouvriers sont prêts à voter le Pen contre 12% pour un candidat PS) et une partie hésite et tatonne sur les valeurs qui fondent notre République et sur la laïcité. Le cadre bi polaire gauche (incarnée par le PS) et droite (incarnée par le RPR puis l’UMP puis les LR) se disloque alors progressivement. Les partis ne savent plus se réinventer de l’intérieur et ne savent plus faire émerger de nouvelles propositions adaptées à la société qui change à une vitesse trop rapide pour eux, enlisés dans leur stato-quo idologique et leurs guerres internes.

E. Macron n’est pas l’artificier de cette dislocation, il comble ce vide laissé par les partis historiques. Agé de 40 ans en 2017, il est en réalité un contemporain cette nouvelle société, de ce nouveau mode de pensée qui se met progressivement en place en France et de cette vision d’une France « en même temps ». Cette expression n’est pas simplement un élément de langage politicien visant à se positionner de manière disruptive par rapport à la doxa rigide des partis traditionnels. Elle traduit parfaitement la complexité de notre monde contemporain et les solutions complexes qu’il convient de définir pour répondre à ces défis. C’est ce dépassement des clivages notamment qui fait qu’il est élu président de la république contre toute attente en 2017.

Mais au-delà de cette vision de la société, Macron, même s’il a réussi à disrupter le cadre traditionnel de la représentation politique, sait (« en même temps pourrais ajouter) rester fidèle à nos Institutions, à l’histoire et à l’héritage de notre République et de notre Démocratie, à tout ce qui fonde l’esprit Français. Les scores et sondages récents démontrent bien que Macron a pris la place des partis PS et LR. Pour la première fois de son histoire, le PS serait peut être sous la barre des 5% alors même qu’en 2012, le PS avait obtenu 280 sièges à l’Assemblée Nationale.

Le retard accumulé depuis des décennies dans bien des domaines soit par manque de courage soit par défaut d’inventivité des politiques continue à faire malheureusement ses effets. Ce n’est pas en un quinquennat, dont l’action a été en grande partie dédiée à gérer la crise sanitaire, que ces décennies de retard se rattrapent. Mais c’est sur ce terrain de la déception et de la colère que jouent le RN d’un côté de l’échiquier politique et LFI de l’autre, dont la marque de fabrique est identique et se niche dans un populisme teinté de souverainisme.

Oublions quelques instants les étiquettes et les chapelles qu’elles soient de droite ou de gauche. On peut constater aujourd’hui que le choix est relativement simple malgrè le nombre importants de candidats à cette élection.

Si on met de côté celles et ceux qui ont une probabilité proche de zéro de franchir le premier tour, il en reste trois. Deux sont contestataires – souverainistes et donc anti europe – anti système et populistes dans le sens où ils véhiculent le conflit du peuple contre les élites.

Face à eux, un seul candidat incarne une ligne modérée dont le programme n’est pas l’addition d’illusions ou de promesses sans lendemain.

Il y a tout de même peu de probabilité que JL. Mélenchon soit au second tour et les différentes études d’opinion montrent que si il était face à Macron, il serait balayé.

Il y a de très fortes probabilité en revanche que le second tour oppose E. Macron à M. Le Pen et que le résultât soit serré … dans un sens ou dans l’autre d’ailleurs….

Ne nous trompons pas d’objectif. Ce qui se joue dans cette élection, c’est la capacité d’un candidat à incarner ce qui fonde l’unité de notre Nation, sa capacité à préserver notre modèle social envers et malgré les crises qui secouent notre monde et sa volonté de défendre nos valeurs républicaines.

Sans aucun doute ce qu’incarne le Pen est aux antipodes de cette incarnation dont a besoin la France. Son programme et sa ligne politique sont synonymes de renfermement sur soi, de division des français entre eux et d’une illusion de protectionnisme à contre courant des intérêts économiques de la France.

Le second tour sera probablement dans la même dynamique que le premier tour. C’est donc dés dimanche prochain que chaque citoyen attaché aux valeurs qui fondent la République française et à l’universalisme hérité de l’esprit des Lumières doit se mobiliser pour mettre en échec le projet du RN.

Voter dimanche, au-delà de nos soucis personnels quotidiens, c’est finalement répondre à une simple question : quelle société voulont nous pour nous même et nos enfants demain ?

« choisir le combat du progrès contre le repli, le combat du patriotisme et de l’Europe contre les nationalistes » E. Macron le 02 avril 2022.

Pour les lecteurs qui en seraient encore à qualifier la politique d’Emmanuel Macron que de droite …… un lien vers un article écrit par les copains et copines de Démocratie Vivante https://www.lopinion.fr/elections/presidentielle/le-vote-utile-a-gauche-cest-macron-la-tribune-de-dominique-villemot-jacky-bontems-et-aude-de-castet?fbclid=IwAR0_yqraLlQXIWRbSaYVRR5KC4egley-U1_paX0eJRGHPZWcTdaxFjnjJ4w