Les polémiques et les déclarations tonitruantes supplantent les débats de fond sur les préoccupations principales des français alors que la campagne présidentielle balbutie depuis quelques semaines. Mais ces balbutiements ne correspondent pas forcément aux préoccupations de la majorité de nos concitoyens, frappés par 2 ans de crise sanitaire, économique et sociale.

Nous assistons de plateaux TV en plateaux TV à un affaissement généralisé du niveau de débat politique. Quolibets, noms d’oiseaux, railleries etc. tout est (malheureusement) actuellement permis dans certaines émissions dignes d’une série B comme celle qui a vu MM. Melenchon et Zemmour s’affronter une nouvelle fois dernièrement.

Comment ne pas penser aussi aux débats au sein du Parlement Européen lors du changement de présidence où, sans honte, Messieurs Jadot, Bardella, Bellamy et Madame Aubry ont cru être à une tribune contre « Macron » au sein de notre hémicycle national. Mais quelle honte de voir ces interventions bénéficiant des caméras gratuites et de la rectranscription dans les médias européens et réseaux sociaux.

Le Président est pour beaucoup devenu bien plus qu’un adversaire politique pour certains opposants, c’est devenu  un adversaire ad hominem. Et donc au nom de la démocratie, l’outrance et la violence verbale peuvent se répandre en dehors de nos frontières jusqu’au au sein de l’hémicycle du parlement européen montrant ainsi l’inélégance de certains de nos responsables politiques nationaux ? Est-ce cela la démocratie, l’exercice qui consiste à vouloir grapiller un point (et encore…) dans un énième sondage en se trompant d’unité de temps, de lieu et d’action quitte à perdre une certaine civilité et élégance républicaine ? A défaut de projet, on « se paye » l’autre …

Cette élection ainsi que le climat ambiant depuis un certain temps me fait penser à un spectacle de bateleurs de foire où, les uns après les autres, les candidats recherchent plus l’acclamation du public que la crédibilité. C’est à qui aura le plus de clameurs venues du public.

Le slogan de nombres d’aversaire est « Je suis le ou la seule à pouvoir battre Macron ». Raisonnablement, est ce là un élément de language qui peut faire office de programme et de vision politique que d’avoir pour seul horizon celui de battre son adversaire lors de la prochaine élection ?

De telles déclarations démontrent une défaite politique, morale et intellectuelle totale de la part de nombre d’opposants. On ne construit rien sur le seul souhait de voir son adversaire battu. Dans le cadre d’une élection présidentielle, on ne gagne rien à terme sans cette capacité à rassembler tous les français dans une dynamique nationale et une concorde collective.

Force est de constater que le degré d’agressivité de certains candidats est proportionnel à leur amateurisme. Amateurisme qui ne leur permettra pas d’assumer le cas échéant la responsabilité en légitimité du niveau qu’exige la magistrature suprême et à proposer aux français un projet qui rassemble, plutôt que de chercher à segmenter encore plus notre société.

La violence politique n’a pas à siéger en démocratie. La démocratie doit uniquement se nourrir de la confrontation de projets, de visions et du débat.

L’affaissement du niveau général de la politique provoqué par certains candidats, l’hystérisation des propos de certains et l’outrance des autres, avec en lame de fond l’incapacité des mêmes à proposer un idéal collectif soudé par le ciment de la concorde, nous rapproche à petits pas d’une invasion de notre Capitole républicain par une poignée de fascistes chauffés à blanc par quelques irresponsables politiques de gauche comme de droite.

A ce moment là, les mêmes qui auront soufflé sur les braises diront devant les caméras « Comment en sommes nous arrivés là ? » mais ne se considèreront pas pour autant responsables ….

Les analystes prévoient aussi une augmentation toujours constante de l’abstention, phénomène déligitimant de fait notre modèle démocratique il faut le reconnaître. Les dernières élections municipales, régionales et départementales ont vu s’imposer l’abstention comme grande gagnante. Bien évidement, la pandémie n’est pas sans effet dans cette affaire. Mais force est de constater que l’abstention gagne inexorablement du terrain à chaque élection locale, territoriale ou nationale. Comment dés lors prétendre représenter ses administrés lorsqu’on rassemble tout au plus 15% du corps électoral comme ce fut le cas par exemple à Montreuil en 2020 et dans bien d’autres communes ?

Nombre de responsables politiques et élus devraient s’interroger sur leur crédibilité et l’image qu’ils donnent et qui ne cesse de se dégrader auprès de nos concitoyens.

Revenant sur la présidentielle, on pourrait attendre à ce que les différents prétendants nous parlent des principaux sujets d’inquiétude des français (pouvoir d’achat loin en tête dans les sondages, santé, environnement pour les 3 premiers). Au lieu de cela, nous avons le droit soit à des postures grandiloquentes ou à des rejets de principes véhéments ou encore à des théorisations sur la civilisation ou l’identité.

Evitons aussi en démocratie les anathèmes et syllogismes consistant à mettre son interlocuteur dans des cases, comme si le monde se résumait à une matrice binaire entre le bien et le mal.

Le monde est complexe et il faut bien admettre aujourd’hui qu’il ne suffit plus de mettre dans des cases bien rangées tel ou tel sujet sous prétexte qu’il serait estampillé de gauche ou de droite. Et d’ailleurs, qui serait placé au dessus de tout cela pour avoir la légimité de délivrer des brevets de gauche ou de droite ?

Le premier acte de préservation de la démocratie est la garantie d’un débat hors de toute vindicte et de toute posture enfermant son interlocuteur dans un rôle et s’enfermant soi même dans un autre. La démocratie ne peut pas en effet ni reposer sur le pouvoir, ni le savoir, mais elle est affaire d’idée et de pédagogie mais aussi de nuance et de tolérance.

J’ai toujours gardé en mémoire cette phrase d’un ancien et respectable militant socialiste de Montreuil avec qui j’ai battu de nombreuses fois le pavé de Montreuil en 2020 :  « Soyons dans le désaccord fertile ». Je crois que c’est une bonne définition de la démocratie, non exhaustive certes, mais qui est un bon point de départ sur la méthode. Heureusement, c’est avec cet état d’esprit que je continue à échanger et débattre avec nombre d’amis ou de connaissances – montreuilloises ou montreuillois – à l’heure actuelle. Et pour cela, je les en remercie car vous serez toujours ma richesse d’esprit et de pensée même si dans l’isoloir nos choix diffèrent.